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«  D’autres viendront et atteindront le point culminant, mais ne vivront peut-être pas pleinement l’excitation d’explorer des vallées inconnues, d’établir la carte de cette région et de voyager avec les compagnons que j’ai eus ».

John B Tyson (1928 – 2014)

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La première exploration du groupe de montagnes du Kanjiroba est l’œuvre de l’autrichien Herbert Tichy qui en 1953, accompagné de sherpas remonte la vallée de la Jagdula khola et gravit deux sommets de la Jagdula Lekh.

Land der Namenlosen Berge. Erste Durchquerung Westnepals. Herbert Tichy, 1954, Wien, Ullstein-Verlag

 Les années 1958 et 1959 virent passer deux expéditions explorant le massif, en l’approchant à l’est depuis le Dolpo.

La quête de John Tyson, un géographe et alpiniste anglais, commence en 1961, lorsqu’il mène une première mission dans le but de cartographier la chaîne de montagnes du Kanjiroba et, si possible d’escalader son point culminant, le Mont Kanjiroba (6883 m.). L’expédition réussit à faire les premières ascensions de plusieurs sommets de plus de 6000 m. offrant d’excellentes vues pour réaliser la cartographie du massif, mais ne fut pas en mesure de remonter la gorge abrupte de la Jagdula khola.

Un compte-rendu détaillé de cette expédition est disponible : https://www.himalayanclub.org/hj/23/10/three-months-in-west-nepal/

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En 1964, il mène une autre expédition, approchant dans un premier temps, le massif à nouveau par le sud. Depuis la vallée de la Kali Gandaki et Tukuche, il traverse une série de cols passant par Tsharka, Tarap et Ringmo avant de rejoindre la vallée de la Garpung khola via le Kagmara La, en profitant pour cartographier la chaîne du Kagmara. Après avoir à nouveau vainement tenté de remonter la vallée de la Jagdula khola, il décide d’approcher dans un deuxième temps, le massif par le nord .

Passant par Maharigaon et Wangri, ils rejoignent le village de Dalphu (Dolphu) et la gorge de la Langu khola. Ce n’est qu’en période de basses eaux, que des ponts temporaires, peuvent être construits au dessus des eaux tumultueuses de la rivière. Il existe bien une autre route le long de la gorge, « une piste de chasseurs » exposée, à flanc de falaises, qui est difficilement utilisable par des porteurs chargés.

Après avoir remonté les premiers kilomètres de la gorge de la Langu khola, ils bifurquent dans une vallée tributaire, celle de la Pukchang Khola (Pukahang k.), sombre, étroite et boisée, prenant rapidement de l’altitude. Ils atteignirent finalement le sommet du Bhulu Lhasa, à partir duquel ils purent voir les deux plus hauts sommets du Kanjiroba briller au soleil. Mais, n’ayant pas remonté la bonne vallée, ces pics leur restèrent inaccessibles.

https://www.himalayanclub.org/hj/26/17/exploring-the-kanjiroba-himal/

West Nepal: Exploring the Kanjiroba Himal, John B. Tyson and G.H.S The geographical journal,  Vol. 133, No. 3 (Sep. 1967), pp. 328-337, http://www.jstor.org/1793543

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L’expédition du printemps 1969 : parcourut à nouveau, le fond de la gorge du Langu. Il embaucha à nouveau Thondup, le villageois de Dolphu qui l’avait guidé en 1964. Cette fois-ci, pour la construction de 5 ponts, Tyson utilisa des échelles en aluminium. Il parvint ainsi à la confluence de la Langu et de la Ruka Khola qu’il remonta. Parvenu au pied des glaciers du Kanjiroba, ils se rendirent rapidement compte que la crête nord-ouest était trop exigeante. Une deuxième tentative sur la crête nord-est faillit mener au désastre une partie du groupe, étant pris dans une avalanche. Ils forcèrent ensuite une route entre la vallée de la Langu khola et la partie haute de la Jagdula khola pour tenter l’arête sud-est, mais la mousson et les neiges molles mirent fin à leurs espoirs de succès.

Contraints de faire demi-tour, Tyson et ses compagnons manquent de nourriture et doivent vivre en partie de miel sauvage en attendant l’arrivée des porteurs venus avec Thondup, pour le aider à sortir de la gorge Une fois dans sa vie, Thondup avait déjà traversé le Jhonpa La et suivi le cours supérieur de la Langu khola en hiver ; il était prêt à essayer de nouveau la route, cette fois-ci alors que le torrent était en crue. Cette remontée de la haute vallée de la Langu khola, alors que le torrent roulait des eaux furieuses, fut le moment le plus périlleux de l’expédition. Ils remontèrent encore près de 13 kilomètres de gorge, se frayant un chemin à travers les falaises à des centaines de mètres au-dessus du fond de la gorge.

Arrivés à Pho, au Dolpo, les dangers étaient terminés. Au sanctuaire des esprits de l’eau (lu) de Pho, Thondup et les porteurs préparèrent une, se puja félicitant d’être encore en vie. A Bhijer, les hommes de Dolphu quittèrent l’expédition rentrant chez eux par la route du nord et le Yala la (Itinéraire emprunté sans doute pour la première fois – depuis la traversée de Toni Hagen accompagné de Peter Aufschneiter et de l’abbé Bordet dans les années 1950 – par un occidental, Christian Kleinert en 1971), tandis que Tyson traversait le Dolpo pour rejoindre rejoindre ensuite Tukuche puis Pokhara.

https://www.himalayanclub.org/hj/29/15/return-to-kanjiroba-1969/

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Versant Nord du massif du Kanjiroba

Arrivée à Pho

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Alors que Tyson lui-même n’ a jamais conquis le Mont Kanjiroba, d’autres visiteurs n’ont laissé aucun doute sur l’ampleur de sa contribution à la découverte des mystères de cette chaîne. En 1970, il fut ravi de recevoir un télégramme de l’équipe japonaise qui, à l’aide de sa carte, avait réussi à atteindre le sommet du Mont Kanjiroba.

« Avec votre permission, nous avons escaladé votre montagne. »

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.La carte établie par J. Tyson

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Tyson entreprit un dernier voyage autour du Kanjiroba Himal en 1998, à l’âge de 70 ans. Accompagné de son fils et d’autres amis, il eut le plaisir de se retrouver à Dolphu avec Thondup, le leader de ses porteurs de 1964 et 1969. Il entreprit ensuite de contourner par le nord, le massif du Kanjiroba en remontant la vallée de la Mugu Karnali khola, passant le Yala La et le Nyingma Gyaltsen La avant de rejoindre Pho puis de traverser le Dolpo via Bhijer et Shey gompa

Il a réalisé trois films sur ses expéditions au Kanjiroba, qui ont tous été diffusés à la BBC.

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A View to Kanjiroba

(for John Tyson)

 

The Langu runs colder by night,

cuts the rune of its passing deep

in bed rock, grinds boulders the height

of houses to sand while we sleep.

 

Dawn: across a gossamer bridge.

The white river spits, roars applause

at first stage-struck steps to the ridge;

deep icy fears begin to thaw.

 

At Dalphu, Tyson wrote, he found

`old friends’, ‘the toughest men’ who will

carry long over savage ground.

Our sherpas shepherd us uphill

 

to this particularity,

this brush of cultures new with old.

But fretting on the quality

of light, my lens is held by bold

 

and bashful eyes: some tiny girls

carry baskets full of stones

from the gorge. On a word, they hurl

loads, again bend backs and small bones.

 

Rag-clad, mud-shod, they let the cruel

path re-claim them. Ashamed, incensed,

I want to ferry all Langu’s

stone to atone for my presence.

 

From Dalphu there’s a clear view through

to Kanjiroba we’d come six

thousand miles to see – and the hewed,

the hand-made trail where Tyson fixed

 

his tree bridges. Do the toughest

men move towards, always towards

the mountain, or find their longest

journeys are the journeys inwards?

 

Tim Noble

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